Vendée Globe

Ce qu’il faut retenir de l’avis de course du Vendée Globe

La SAEM Vendée a dévoilé mercredi l’avis de course de la 11e édition du Vendée Globe, qui s’élancera le 12 novembre 2028. Pas de révolution par rapport à la précédente, mais une évolution du système de qualification et de sélection. Sailorz vous en dit plus.

C’est au Vendée Parnasse, qui abrite les locaux parisiens du département de la Vendée, en face de la tour et de la gare Montparnasse, qu’Alain Leboeuf, président de la SAEM Vendée, et Nicolas Chénéchaud, maire des Sables d’Olonne depuis le 29 septembre, accompagnés du président de la classe Imoca, Antoine Mermod, ont convié la presse mercredi 19 novembre pour présenter l’avis de course (le document est ici) de la 11e édition du Vendée Globe.

L’épreuve, qui fêtera ses 40 ans pour l’occasion, s’élancera le 12 novembre 2028 à 13h02 et s’appuiera sur un nouveau système de qualification et de sélection, mis en place par la SAEM et l’Imoca, qui, au passage, ont renouvelé la convention qui les lie jusqu’à la fin de l’édition 2032 – moyennant une contribution financière de la première vers la seconde de 100 000 euros par an. “L’objectif était de faire évoluer le système en fonction de ce qu’on avait constaté sur le cycle précédent pour qu’il soit plus équitable et agile”, a confié en préambule Alain Leboeuf.

Avant de rentrer dans le détail, avec d’abord une règle de qualification qui change, puisque, pour cocher cette case, un marin devra finir sur son bateau du Vendée Globe une des cinq courses en solitaire de grade 2 inscrites au calendrier 2025-2028 – dans l’ordre chronologique Vendée Arctique, Route du Rhum-Destination Guadeloupe, Retour à La Base, Transat CIC et New York-Vendée -, dans un temps inférieur au double de celui du vainqueur. Auparavant, il fallait prendre le départ de deux courses en solitaire (dont une avant fin 2023) et en finir une dans un temps inférieur à une fois et demie de celui du vainqueur.

Pour ce qui est de la sélection, qui ne s’appliquera que s’il y a plus de 40 inscrits, là où le nombre de milles parcourus servait auparavant à départager les candidats, c’est cette fois un système de points qui est mis en place. Sur les 18 épreuves des Imoca Globe Series 2025-2028 (dont le Vendée Globe 2024), classées de grades 1 à 4, sont attribués des points de façon dégressive en fonction des résultats, qui tiennent également compte de leur format (solitaire, double, équipage) – les équipiers et co-skippers marquent par exemple 50 % des points du skipper principal.

Afin de prendre en compte les situations individuelles qui avaient posé problème lors du cycle précédent – maternité, maladie ou blessure, étrangers qui ont plus de difficultés pour se rendre au départ des courses -, ce système ne prend en compte que les 9 meilleurs résultats enregistrés sur les 13 courses de grade 1 à 3, tandis que, selon le Alain Leboeuf, “la moitié des points du dernier sera attribuée à ceux qui abandonnent mais font au moins 50% de la course”. Pour finir, la SAEM Vendée se garde le droit d’attribuer trois wild cards – contre une en 2024.

Moins de pression sur les skippers


Peut-on dès lors parler de système moins exigeant ? “Je dirais plutôt différent, répond Antoine Mermod. Celui de 2024 était basé sur la quantité, du coup, il fallait très vite commencer son projet. La limite, c’est que ça a mis beaucoup de pression sur les skippers et qu’il y a eu des effets de bord qui ont mis en péril certains projets, c’était sans doute un peu démesuré. Là, il est plus basé sur la qualité.”

Jointe jeudi par Sailorz, Clarisse Crémer, concernée au premier chef par le sujet de la maternité sur le cycle précédent, estime que ces nouvelles règles “lissent la problématique qui était d’être obligatoirement à fond pendant quatre ans, donc la tendance est positive, et si tu prends mon cas de la dernière fois, j’aurais été beaucoup plus sereine avec ce règlement“. Elle s’interroge en revanche sur le fait que la question de la maternité n’ait pas été traitée comme un cas à part, “alors qu’avoir un enfant n’a pas les mêmes conséquences pour une femme que pour un homme”.

Présent lors de la conférence de presse parisienne mercredi, Sébastien Marsset se montre quant à lui satisfait : “La course aux milles a clairement mis tout mon projet sous pression et un an après le départ, je le paie encore. Ce nouveau système va enlever un peu de pression sur les épaules des skippers.” Joint jeudi en plein convoyage retour de son Imoca depuis la Martinique, Louis Duc ajoute : “Il y a quatre ans, le stress était permanent parce qu’on savait qu’il y avait beaucoup de projets et qu’il fallait absolument faire toutes les courses. C’est moins le cas aujourd’hui, j’ai compté une vingtaine de projets vraiment ancrés pour 2028, il y en aura forcément une dizaine de plus, mais pas sûr que ça aille très au-delà.”

Ce nouveau système est-il également motivé par un contexte économique plus compliqué ? “Ce n’est pas une réponse au contexte économique, mais le fait est qu’il permet d’arriver au Vendée Globe de façon plus progressive, indique Antoine Mermod. Aujourd’hui, on voit bien que la projection à trois-quatre ans est plus difficile pour les entreprises, mais le Vendée Globe reste un événement XXL et je ne serais pas étonné que des projets se montent en 2027 et qu’on atteigne les 40.”

Un système trop « facile » ?


Reste que certains marins, et non des moindres, se retrouvent aujourd’hui sur le carreau, ce que Jérémie Beyou, interrogé avec Morgan Lagravière par Ouest-France après son arrivée victorieuse sur la Transat Café L’Or, pointait du doigt, estimant au passage que “les sélections pour le Vendée Globe ne sont pas assez dures“. Questionné mercredi sur le sujet, Alain Leboeuf a répondu : “Le Vendée Globe est une course merveilleuse parce qu’elle accueille de grands sportifs, et Jérémie en fait partie, mais aussi des aventuriers, qui ne partent pas pour être premiers mais font rêver le public.” Clarisse Crémer abonde : “Je comprends le point de vue de Jérémie et Morgan en tant que sportifs parce que c’est leur ADN, mais je pense qu’ils se trompent sur ce que les gens aiment regarder en 2025. Et tu ne peux pas reprocher à des marins moins bien classés d’avoir plus de suivi.”

Joint jeudi par Sailorz alors qu’il est lui aussi en convoyage vers la Bretagne, le skipper de Charal a tenu à préciser le fond de sa pensée : “L’idée n’est pas de critiquer certains projets, mais juste de dire le Vendée Globe doit rester une course de haut niveau. Aujourd’hui, des gens comme Tom Dolan, qui gagne le Figaro, Morgan Lagravière, triple vainqueur de la Transat Café L’Or, Nico Troussel ou même Franck Cammas n’arrivent pas à trouver de budget pour le Vendée. Est-ce que les sponsors ne devraient pas plutôt miser sur des profils comme ça, qui vont faire une super perf, à l’image de Sam (Godchild) ou Justine (Mettraux), dans le top 10 du dernier Vendée avec un bateau de deuxième main ?”

Et Jérémie Beyou d’ajouter : “Ce qui me dérange, et je ne suis pas le seul, c’est qu’il y a un très grand écart entre les dix-quinze premiers et ceux de derrière. Et quand je vois dans le nouvel avis de course que tu peux te qualifier en faisant le double du temps du premier sur une transat, je trouve ça énorme. Je pense que même ceux qui ont moins de moyens et veulent démarrer sur le Vendée, on peut leur demander un petit peu plus, parce qu’avec ces règles, ils peuvent se contenter du minimum et de sécuriser leur truc, ce qui est compréhensible.”

Pour Sébastien Marsset, cela n’empêche pas pour autant les « petits » projets de viser eux aussi la performance : “Sur le dernier Vendée, nous aussi, on a fait une compétition de dingues. On s’est retrouvés à dix bateaux en 100 milles dans l’Indien, quatre la même journée à l’arrivée. OK, on n’a fait ni un podium ni un top 10, mais on était quand même dans une démarche sportive, c’est bien pour ça qu’on était accueillis au sein du pôle Finistère course au large. Et aujourd’hui, il faut accepter que pour être un bon marin, on doit certes s’entraîner sur l’eau, mais pas que. Quelque part, que ça plaise ou non, la compétition se joue aussi sur d’autres plans, dont celui de la communication, il faut arriver à faire évoluer ses référentiels qui ne sont plus les mêmes qu’il y a dix ou vingt ans.”


Ce que Sailorz a également appris de la conférence de presse :

  • La NY Vendée maintenue en 2028. Alors que sa tenue dans la foulée de The Transat CIC n’était pas garantie, la New York-Vendée aura bien lieu au printemps 2028. “On avait imaginé la programmer un an plus tôt pour avoir une course par an – départ du Vendée Globe en 2024, arrivées en 2025, Vendée Arctique 2026, New York-Vendée 2027 puis Vendée Globe 2028 -, mais on a vu la difficulté d’organiser une course comme celle-ci en parallèle de The Ocean Race. Et on a bien senti combien nos prétendants au Vendée Globe avaient besoin de cette dernière phase d’entraînement quelques mois avant le départ”, a confié Alain Leboeuf.
  • Vers l’autonomie énergétique ? Si la jauge Imoca a peu changé par rapport au cycle précédent, elle contient deux nouveautés principales, un nouveau mât monotype plus solide et l’objectif de l’autonomie énergétique sur Vendée Globe 2028, avec, a expliqué Alain Leboeuf, un système de pénalités à la clé. “Les marins embarqueront 60 litres de gasoil dont ils se serviront à leur guise et 60 supplémentaires plombés, dont l’utilisation éventuelle sera appréciée par le jury, qui prononcera des pénalités le cas échéant, a précisé Antoine Mermod. C’est un effort conséquent car sur le dernier Vendée, les concurrents ont consommé en moyenne 240 litres, et c’est un vrai défi technologique.”
  • Un PC course et une galerie du Vendée Globe. Nicolas Chénéchaud et Alain Leboeuf ont annoncé la construction future d’un PC course en dur et d’une galerie du Vendée Globe, attendus pour 2028. “Pour le PC course, l’idée est de faire des économies, plutôt que d’en remonter un à chaque fois, sachant que comme la ville organise d’autres grandes courses, il pourra avoir de multiples temps d’utilisation”, a expliqué Alain Leboeuf, avant de préciser : “Nous sommes en train de travailler un acteur local qui puisse rentabiliser ces locaux, ce n’est pas le département qui construira directement.” Ce qu’il fera en revanche pour la galerie, destinée “à faire vivre le Vendée Globe toute l’année”, et pour laquelle le président de la SAEM a indiqué : “J’ai posé une condition pour qu’elle se réalise, c’est qu’il n’y ait aucune charge de fonctionnement qui pèse sur le département.”
  • Un prizemoney en hausse. Alain Leboeuf a annoncé une hausse du prize-money de 200 000 euros par rapport à l’édition précédente, dont 50 000 pour le vainqueur, qui touchera 250 000 euros.
  • La série TV du Vendée Globe pas avant septembre. La série de six épisodes, tournée sur le Vendée Globe 2024, ne sera pas diffusée sur France Télévision (en prime time) avant septembre 2026, Red Bull étant par ailleurs chargé de sa distribution à l’international.

Photo : Jean-Marie Liot / Alea

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